Pour distribuer son iPhone, Apple mise sur un nouveau
modèle économique basé sur des rentes régulières, rompant avec le
modèle traditionnel. Orange va lui reverser une part des revenus tirés
des forfaits et services, pouvant représenter 240 euros par client sur
24 mois.
Et si l'interface n'était pas la principale innovation de l'iPhone ?
Son modèle économique tranche lui aussi avec ce qui existe sur le
marché de la téléphonie mobile. « Dans son principe, le modèle est
unique car il prévoit des revenus récurrents pour Apple, générés par la
consommation des clients utilisant l'iPhone », explique Vincent
Poulbère, analyste télécoms chez Ovum.
Apple va au-delà de la seule revente, comme c'est le cas
habituellement sur le marché, en recevant un reversement compris entre
10 et 30 % des revenus générés par l'opérateur sur l'iPhone. En
contrepartie, la firme de Steve Jobs accorde une exclusivité de longue
durée (plus de 24 mois).
Le cabinet Sia Conseil a modélisé ce reversement pour le marché français. Avec des abonnements facturés par Orange de 49 à 119 euros,
Apple encaissera au minimum 100 à 240 euros en moyenne par client sur
24 mois, estime le cabinet, sur la base d'un reversement de 10 %, et
sans compter les dépassements de forfaits et les autres services
utilisés.
Une marge additionnelle de 60 à 150 %
Apple gagne déjà environ 140 euros avec la vente de l'appareil selon les calculs du cabinet d'études iSuppli.
Avec le reversement d'Orange, il ajoute une marge additionnelle de 60 à
150 % par rapport à celle réalisée sur la vente du terminal.
« Sur les abonnements les plus chers, Apple
réalisera bien plus de revenus sur le reversement de l'opérateur que
sur la vente de l'iPhone », souligne Stéphane Dubreuil, directeur du
pôle Médias et Télécoms chez SIA Conseil. « Cela n'a jamais été fait ».
La firme de Steve Jobs va également obtenir sa part sur les
ventes d'accessoires et des recettes de certains partenaires, comme
YouTube, qui lui reversent une portion des revenus générés sur leur
trafic. Sans compter les ventes directes de sonneries ainsi que les morceaux de musique à télécharger pour les
fonctions baladeurs, via sa plate-forme iTtunes Store.
Pour Orange, un impact sur ses autres offres
Dans le tandem, le rôle d'Orange est donc considérablement
réduit. Habituellement, les opérateurs achètent des combinés en grandes
quantités, appliquent une subvention pour en faire baisser le prix de
vente (via les programmes de renouvellement ou les promotions,
notamment, Ndlr), et génèrent des revenus sur les abonnements et
l'ensemble des autres services dont ils sont également les principaux
fournisseurs. Mais Apple lui a demandé de n'appliquer aucune subvention sur l'appareil.
Même si France Télécom espère vendre entre 400 000 et 500 000 abonnements liés au smartphone à compter de 2008, l'iPhone ne sera sans doute pas le plus gros succès financier d'Orange. Mais il bénéficie d'un énorme pouvoir d'attraction. «
Le trafic additionnel généré dans les magasins grâce la force
d'attractivité de la marque, aura un effet d'entraînement sur le reste
de la gamme Orange. En effet, l'opérateur va compléter sa gamme pour
cibler l'ensemble des budgets, avec d'autres offres plus abordables
ciblant le coeur du marché », estime SIA.
Un modèle qui fera difficilement des émules
Le modèle innovant d'Apple peut-il être
récupéré par d'autres fabricants ? « Je ne pense pas que le modèle de
l'iPhone soit susceptible d'être généralisé », estime Vincent Poulbère,
d'Ovum.
Et l'analyste d'évoquer deux raisons. La première est qu'aucun
autre acteur n'aurait la capacité d'Apple à susciter autant
d'attractivité autour d'un produit, hormis peut-être Nokia. La seconde
est que le rapport de force habituel entre les opérateurs et les
fabricants ne serait pas suffisamment en faveur des constructeurs pour
qu'ils obtiennent autant qu'Apple. Dans le modèle traditionnel, les
opérateurs sont les principaux acheteurs de combinés, et ils ne se
plient donc pas forcément aux exigences des fabricants. Des positions
qui expliquent les difficiles négociations entre Orange et Apple autour
de l'iPhone.
Là encore, à part Nokia et ses 40% de parts de marché, aucun
fabricant ne pèse assez lourd sur le marché pour imposer un nouveau
modèle. Le géant finlandais serait donc le seul à pouvoir tenter
d'obtenir des rentes régulières auprès des opérateurs, comme le fait
Apple.
Pour la période des fêtes (jusqu'au 15 janvier), SIA
Conseil estime qu'Orange est en mesure d'écouler entre 140 et 160 000
iPhone, soit environ 20 000 par semaine. Des prévisions correspondant à
l'objectif de l'opérateur, qui espère déjà en vendre 100 000 en un mois.
Source zdnet